Patricia : ” Lorsque vous avez appris le diagnostic … Patricia : « C’était dans l’année 2000, j’ai cru que le ciel me tombait sur la tête, mon radiologue en regardant l’IRM m’a dit ” eh bien maintenant vous avez votre diagnostic, c’est une S.E.P.” J’étais seule, j’ai éclaté en sanglots. En reprenant le volant de ma voiture, je suis passée au feu rouge, j’étais en état de choc…” 4 pages

Le même texte ci-dessous :

« Pas facile de donner des ailes à un texte sur le début du diagnostic, car la SEP me les a en quelque sorte coupées ! »

Lorsque vous avez appris le diagnostic … :

C’était dans l’année 2000, j’ai cru que le ciel me tombait sur la tête, mon radiologue en regardant l’IRM m’a dit ” eh bien maintenant vous avez votre diagnostic, c’est une S.E.P.”

J’étais seule, j’ai éclaté en sanglots. En reprenant le volant de ma voiture, je suis passée au feu rouge, j’étais en état de choc.

J’aurais aimé être accompagnée quand on m’a annoncé ce diagnostic, pouvoir être soutenue moralement. L’accompagnement est essentiel, pour éviter l’effondrement en pareille circonstance, proche d’une perte d’identité, enfin c’est ce que j’ai ressenti ! …

J’ai eu mon diagnostic à l’âge de 40 ans, mais j’avais des symptômes depuis l’âge de 34 ans, après l’accouchement de mon troisième enfant. J’ai eu ma première poussée invalidante à 38 ans. Des troubles de la marche qui à l’époque avait été mis sur le compte d’une lomboradiculalgie bilatérale. On venait de me supprimer mon poste d’aide médico-psychologique pour inaptitude physique et de nombreux arrêts de travail depuis 1998. »

Comment vous êtes vous regardée ?:

Je me suis regardée comme quelqu’un d’autre, ensuite au fil des années ce n’était plus la même Patricia, il me fallait paraître dans la norme face à ma famille, à mon travail, mais j’étais sans cesse secouée par des poussées très fluctuantes et invalidantes».

Votre corps ?:

J’ai eu la chance d’avoir un kinésithérapeute qui a pu comprendre, et m’apporter une aide précieuse, physique et moral, intervenant à domicile dans les phases de complète prostration, courbée par la douleur, marchant comme un robot. J’ai pu reprendre confiance en moi, aidée par une équipe pluridisciplinaire que j’ai choisie. Mon médecin traitant, mon kinésithérapeute, un professeur de Paris.

Ce que vous avez changé dans votre manière de vivre … :

Je vais à l’essentiel, car je récupère de moins en moins après chaque poussée. J’apprends à gérer mon énergie au jour le jour, je ne peux plus faire de projet à long terme. La maladie est sournoise et le combat est quotidien, fatigue chronique, douleurs diffuses, vertiges, incontinence en poussée, difficultés pour marcher sur un long parcours, perte de mémoire…

Avez-vous essayé d’en parler avec quelqu’un ? :

Oui, j’en ai parlé avec mon employeur, mes proches, des amis, des malades au sein d’un groupe de parole à la NAFSEP.

Dès le début du diagnostic : avez-vous ralenti votre rythme ou au contraire vous êtes-vous lancée dans de nombreuses activités ? :

Je me suis lancée dans des démarches administratives. Pour ma reconversion professionnelle en agent administratif, contrainte et forcée de ne plus pouvoir me déplacer comme je le souhaitais, j’ai demandé un bilan de compétences à mon employeur et j’ai pu par la suite réussir ma reconversion et faire mes preuves sur Paris, le seul poste vacant que l’on m’a proposé après cinq ans d’attente (j’habite en Haute-Normandie). J’ai tenu trois mois, le trajet a eu raison de ma volonté. Je suis actuellement dans l’attente d’un projet de télétravail à domicile, évoqué tout récemment par mon employeur face à ma volonté de garder un statut de salarié.

J’ai pu malgré tout, continuer ma passion, la culture de plantes vivaces, et j’ai obtenu le premier prix des jardins fleuris de la ville d’Evreux. Le Maire Monsieur Jean-Louis DEBRE m’avait remis un chèque de 100€ que j’ai reversé à une Association des maladies rares, car en 2002 j’apprenais que j’étais atteinte d’une deuxième maladie auto-immune une myopathie inflammatoire, appelée myofasciite à macrophages (qui fait partie des 8000 maladies rares). »

Ce qui a changé dans le regard que vous portiez sur vous-même… :

Je vis mal de devoir utiliser un fauteuil en poussée aigue ou pour une longue balade quand mes jambes ne répondent plus. Je me sens diminuée physiquement, j’ai toujours envie de faire des tas de choses, mais je peux de moins en moins effectuer toutes les tâches quotidiennes. J’étais hyper active à 34 ans et maintenant à 46 ans, je ne me reconnais pas, j’ai du mal à accepter de me voir diminuer progressivement ».

Avez-vous été aidée ?:

Oui, j’ai été aidé par mon mari, par mes parents financièrement, moralement par une soeur infirmière, un cousin avocat, par quelques amis, par le Conseil Général d’Evreux, qui m’a fait don d’une somme de 200 euros pour l’achat de mon fauteuil en 2003, par la mutuelle d’EDF qui a contribuée à l’aide financière dont j’avais besoin. Par une assistante sociale de mon quartier, qui a pu me diriger vers les organismes que je viens de citer ».

Qu’attendiez-vous des autres ? :

De l’assistance pour le quotidien quand j’étais en poussée, de l’assistance pour le parcours administratif parfois très fatiguant, de la compréhension, de l’humanité tout simplement.

Parfois je surprends un regard effrayé de personne me voyant en période de poussée.

Quand je suis en fauteuil, des personnes disent bonjour à mon mari, et moi j’ai l’impression d’être transparente. Je comprends la gêne de certaines personnes, peut-être de la pudeur, de l’embarras, que sais-je. Même quand je suis en poussée invalidante, j’ai toute ma conscience, mes facultés sont ralenties, mes émotions sont intactes et ma sensibilité est exacerbée. La souffrance psychologique est terrible !
Le regard de mon mari, renvoie de l’angoisse, de l’inquiétude. Il m’apporte un soutien sans faille, et se dépense sans compter pour prendre en charge le quotidien.

Votre mari vous apporte un soutien sans faille : parlez nous un peu plus de lui et de vous.

Mon mari, témoin de toutes ces années, ne peut verbaliser ce qu’il ressent. Nous sommes mariés depuis 27 ans et nous nous connaissons depuis 30 ans. Sa seule réponse “on fait avec”.

Le regard de mes enfants est interrogateur, parfois fuyant, ou insistant .

Avez-vous expliqué à vos enfants ce qui se passait et comment ? Pensez-vous qu’une aide extérieure pourrait les aider ? Que souhaitez-vous leur dire ?:

Mes trois enfants ont été informés. Maintenant le plus vieux a 24 ans, vit maritalement. Ma fille de 20 ans est avec nous. Le dernier 12 ans m’a toujours connue en poussée et en rémission, il me dit souvent “je serai toujours là pour toi”. Quand je commence à avoir des difficultés pour marcher, il va me chercher mon fauteuil comme s’il allait me chercher un verre d’eau !

Mes enfants savent que l’être humain a des ressources, et que l’on peut s’adapter au fil du temps, c’est ce que j’ai essayé de leur montrer.

Les deux plus vieux ne veulent plus entendre parler de la maladie, car ils ont subi et il me semble “qu’ils sont blindés”.

Pour le dernier, j’aimerai cependant un soutien, lorsque je ne pourrai plus suffisamment lui apporter de l’aide pour ces devoirs ou autres tâches qu’une mère de famille a à charge. Mon mari jouant le rôle de tierce personne dans les moments difficiles, ne pourra pas tout assumer. »

Le regard des autres sur vous… Au début du diagnostic ? :

Oui, ma famille, mes enfants, trouvaient que je parlais trop de ma maladie, mes enfants se sont sentis délaissés car je donnais beaucoup pour les malades, bénévolats, écoute téléphonique…

Vous semblez être une personne battante et pleine d’énergie même si la maladie vous touche de plein fouet.

J’ai encore beaucoup d’énergie intérieure »

………………..
Vous vouliez parler des associations de patients :

Dès que j’ai eu mon diagnostic de SEP, j’ai adhéré à la NAFSEP, et j’ai eu la visite de Marie-Madeleine LION qui m’a apporté un soutien formidable. Nous avons visionné une cassette sur le témoignage de différentes personnes atteintes de SEP. J’ai pu a ce moment là, visualiser les différentes formes de la maladie, et comment on apprend à vivre avec. Merci à elle.

Je remercie aussi l’Association des Paralysés de France (APF), en particulier Thibault LEMAGNANT, Directeur de la délégation de l’Eure, et Monique JEAN Vice Présidente du réseau S.E.P. qui m’ont apporté leur soutien. Cela m’a permis de poursuivre mes démarches administratives, et démontrer à mon employeur que j’avais encore des ressources pour m’affirmer sur mes droits en temps que salariée handicapée.
Un projet de télétravail à domicile, vient poindre tout récemment, proposé par mon employeur la C.C.A.S. E.D.F.

Merci Patricia pour ce témoignage.

Propos recueillis par Sylvaine Ponroy – APF Ecoute Infos