3 questions à… Maude Espagnacq (Irdes), Stéphanie Guillaume (Irdes) et Emmanuelle Leray (EHESP, Inserm U1309 RSMS), juin 2024.

 


Conséquences financières de la mise en invalidité des personnes atteintes de sclérose en plaques et points de vue des malades

Espagnacq M. (Irdes), Guillaume S. (Irdes), Leray E. (EHESP, Inserm U1309 RSMS), en collaboration avec Duguet E. (Université Paris-Est Créteil), Pichetti S. (Irdes), Regaert C. (Irdes)

Questions d’économie de la santé n° 289 – mai 2024, Pdf, 8 pages

  • Résumé :
    La sclérose en plaques (SEP) est une maladie neurologique débutant chez le jeune adulte entre 20 et 40 ans, dont l’évolution s’étend sur plusieurs décennies. En France, elle touche environ 134 000 personnes. La dégradation progressive de l’état de santé, associée à une espérance de vie supérieure à 65 ans, a des conséquences importantes à long terme sur le maintien en emploi. Elle pose aussi la question de la compensation financière liée aux difficultés à mener une activité professionnelle normale.
    Pour un tiers des personnes, l’arrêt de l’activité professionnelle, après de nombreux arrêts maladie, précède l’entrée en invalidité. Cependant, si les personnes atteintes de SEP passent rapidement en invalidité dans les années suivant la mise en ALD, cette mise en invalidité n’est pas synonyme de l’arrêt total du travail à court terme. L’état de santé de ces personnes les contraint à se mettre précocement en invalidité sans pour autant cesser complètement leur activité professionnelle. La date d’entrée en invalidité par rapport au déroulement de la carrière professionnelle, les règles de cumul de salaire et de pension et l’hétérogénéité des situations vis-à-vis de la couverture prévoyance privée conduisent à des situations très différentes.
    Les entretiens, menés dans le cadre de cette recherche s’appuyant sur une méthode mixte, montrent la complexité de l’accès aux droits et une moindre perte de ressources pour les personnes les mieux informées. Une meilleure orientation dès le début du diagnostic vers une assistante sociale ou le médecin conseil, ainsi qu’une information claire sur les dispositifs, contribueraient à aider une partie des individus à prolonger leur carrière, notamment à temps partiel. Le système d’indemnisation répond principalement à une logique de compensation financière au regard de la carrière réalisée avant l’entrée en invalidité. Un des enjeux des futures évolutions du système de protection sociale sera, dans un objectif d’équité horizontale, de préserver les possibilités de carrière malgré l’invalidité.

Site web : www.irdes.fr


Impact de la sclérose en plaques sur l’emploi et le revenu : des informations d’un échantillon aléatoire représentatif des salariés du secteur privé en France à l’aide de données administratives longitudinales

 

Impact of multiple sclerosis on employment and income: Insights from a random sample representative of private sector employees in France using longitudinal administrative data. E. Leray, C. Regaert, E. Duguet, S. Guillaume, S. Pichetti, M. Espagnacq, Revue Neurologique, 2024, ISSN 0035-3787,
https://doi.org/10.1016/j.neurol.2024.02.389

  • Résumé (traduction google) :

En France, peu de sources de données sont disponibles pour estimer l’impact de la sclérose en plaques (SEP) sur le maintien dans l’emploi et ses conséquences sur le niveau de ressources, notamment sur de grands échantillons représentatifs. L’objectif de la présente étude était de mesurer l’impact de la SEP sur les taux d’emploi, les salaires et les revenus (y compris les allocations de chômage, les allocations de maladie et les pensions d’invalidité) en comparant les trajectoires professionnelles des personnes vivant avec la SEP avec celles d’un groupe témoin apparié. Nous avons utilisé la base de données HYGIE, qui est le résultat du couplage de deux bases de données administratives du secteur privé pour un échantillon aléatoire de plus de 900 000 personnes. Afin d’identifier l’effet causal de la SEP sur l’emploi après 1 à 20 ans, la méthode des différences de différences avec appariement (âge, sexe, carrière et antécédents de santé) a été utilisée, globalement et en sous-groupes. L’année d’entrée dans le statut de maladie à long terme pour la SEP a été utilisée pour approximer l’apparition de la SEP. Au total, 946 personnes atteintes de SEP ont été incluses. Leur situation était assez favorable avant la SEP (88,1% d’emploi, ressources supérieures à la médiane de la population générale), mais la SEP avait des effets négatifs forts et continus. En effet, à 10 ans, le taux d’emploi a baissé de 28,6 points de pourcentage (pp) et l’allocation de pension d’invalidité a augmenté de 50,5 pp ; le centile des salaires a diminué de 19,2 points de pourcentage et le revenu de remplacement a représenté une part croissante du revenu total (+ 39,7 points de pourcentage). Même si les données administratives présentaient plusieurs points forts, les informations cliniques sur la gravité de la maladie ou sur sa prise en charge thérapeutique n’étaient pas disponibles. En conclusion, cette étude montre que les effets de la SEP sur la population occupée du secteur privé surviennent tôt dans l’évolution de la maladie et sont cumulatifs, et que les revenus de remplacement contribuent à réduire les pertes de ressources grâce au système sanitaire et social français.